
La Bourse de Commerce propose une projection du premier film de Jean Cocteau, Le Sang d’un poète (1930), à l’occasion de l’installation « Vingt-quatre images par seconde » par le cinéaste et sculpteur Ali Cherri dans les vitrines du Passage du musée.
La séance est suivie d’un échange entre Ali Cherri et le critique de cinéma et journaliste Philippe Azoury, modéré par Jean-Marie Gallais, conservateur de la collection Pinault et commissaire de l’exposition Ali Cherri.
Programme
18h — ouverture des portes
18h30 — projection du film (55 minutes)
19h30 — échange entre Ali Cherri et Philippe Azoury, modéré par Jean-Marie Gallais
Commandité et produit par son mécène le vicomte Charles de Noailles, Le Sang d’un poète (1930) de Jean Cocteau inaugure la trilogie qu’il consacre à Orphée. Sous l'injonction d'une statue animée, un poète plonge dans un miroir et découvre, de l'autre côté, un univers étrange et fascinant. Ce voyage fantastique et onirique, en quatre tableaux successifs, révèle la mythologie personnelle du peintre, cinéaste et poète français, se déployant autour des thèmes du regard, du passage et de l’initiation.

Lors de ses premières visites à la Bourse de Commerce, Ali Cherri est happé par les 24 vitrines qui encerclent la Rotonde ; elles lui évoquent les 24 images par seconde qui, au cinéma, insufflent l’illusion du mouvement. L’agencement circulaire des vitrines invite à une déambulation hypnotique, où chaque pas devient une allégorie du temps qui s’efface et se reforme. Il décide alors de les transformer en un dispositif cinématographique : un espace où des objets supposés inanimés prennent vie sous le regard des spectateurs. Le fil conducteur de cette composition est Le Sang d’un poète de Jean Cocteau, film dans lequel le poète, interprété par Enrique Riveros, découvre en traversant un miroir une fabrique de songes où tout semble possible : des statues prennent vie, des mains cherchent désespérément à ouvrir des serrures, des visages peints s’éveillent et interpellent. Ali Cherri en tire des phrases qu’il place à l’intérieur de certaines vitrines de la Bourse de Commerce, comme une voix off qui accompagne le visiteur. Certaines sculptures en sont aussi directement inspirées. Ainsi, A Mouth, A Wound (2025) qui représente deux bouches dans des paumes de mains fait référence à une scène dans laquelle une bouche se dessine dans le creux de la main du poète et se met à parler.
Né à Beyrouth (Liban), Ali Cherri vit et travaille entre Beyrouth et Paris. Il appartient à cette génération d'artistes libanais née pendant la guerre civile (1975-1990) dont le travail a été fortement affecté par ce contexte d'instabilité. À travers son travail plastique et vidéo, Ali Cherri opère des glissements temporels entre les mondes antiques et nos sociétés contemporaines, des allers-retours constants entre mythes fondateurs et utopie d'un progrès sans limite. Son œuvre explore ainsi les liens qui unissent archéologie, récits historiques et patrimoine culturel, et s'attache de fait aux processus de fouilles, de déplacement et de muséification de vestiges, qui sont autant de violences faites à des pratiques culturelles immémorielles et à des sites archéologiques.