François Pinault's interview
« From time to time, I come across a work that really stands out, a striking masterpiece that seems to call out to me, and that is a very good sign. »
Que ressentez-vous au contact des œuvres contemporaines ?
Ça dépend lesquelles, il y a des œuvres, en face desquelles on ne ressent rien, on ne ressent rien ou pas grand-chose. Et de temps en temps, il y a l'exception, il y a le chef d'œuvre, qui vous tétanise, qui vous interpelle et là, c'est plutôt bon signe.
Que se passe-t-il au moment de la rencontre avec une œuvre d’art ?
Ce qui se passe, je ne saurais pas le définir, c'est une intense émotion, c'est une chose qui vous saisit, qui vous interpelle, qui vous frappe. C'est la passion qui vous marque et vous êtes un peu piégé, en vous disant cette œuvre-là, je ne peux pas la laisser filer. Et on rentre dans le processus pour l'ajouter à une collection pour permettre à d'autres de la regarder. En espérant que beaucoup d'autres auront la même émotion que celle que j'ai ressentie la première fois.
Quelle est l’œuvre de votre collection qui vous a donné le plus de joie ?
J'espère que c'est celle que je verrais demain ou dans les années qui viennent. J'ai souvent beaucoup de joie avec des œuvres. Mais je rêve que la plus belle, celle qui me donnera le plus de joie, c'est celle que je verrais demain matin.
Que souhaitez-vous pour le public qui viendra voir ces œuvres ?
Il y a beaucoup d'œuvres contemporaines, peut-être un peu d'avant-garde, qu'un public non averti aura du mal à saisir, mais j'espère qu'il essaiera de comprendre, qu'il essaiera d'ouvrir son esprit et ça lui permettra de voir les choses différemment de la marche du monde, de sa propre vie. C'est un remède, c'est le meilleur, je crois.
Qu’est-ce qui fait la singularité de ce musée à la Bourse de Commerce ?
Il y a son histoire, déjà, il y a son emplacement dans Paris, il y a surtout cette architecture 18e, 19e, très imposante, il y a surtout cette coupole extraordinaire. C'est pourquoi j'ai voulu que cette architecture du passé soit restaurée dans les règles de l'art avec beaucoup d'attention, dans le respect de ce qui s'est fait il y a un siècle ou deux, même un peu plus avec la colonne Médicis et l'intervention de l'architecture du 21e siècle avec Tadao Ando. Montrer comment une architecture ancienne, du temps passé, de qualité, puisse vivre en harmonie avec une architecture audacieuse du 21e siècle. On voit que tout cela, ça fonctionne. Comme dans l'art d’ailleurs, c'est la même chose.
Pourquoi avoir choisi d’investir ce bâtiment ancien et en partie classé ?
Je pense qu’avoir permis à des architectes d’aujourd’hui d’appréhender cette construction ancienne, de faire quelque chose de tout à fait nouveau, c’est la vie qui continue ! On ne rejette pas l’architecture du passé comme l’art du passé, il y a de très belles choses qui se sont faites dans les siècles passés, mais en même temps il se créé encore aujourd’hui des choses de qualité, que ce soit l’architecture, la peinture, la sculpture. C’est ce que Tadao Ando a magnifiquement réussi à faire.
Comment avez-vous accueilli le premier dessin de Tadao Ando pour la Bourse de Commerce ?
Je l'ai accueilli avec surprise parce que ç’a été très vite. J’étais stupéfait de la vélocité de ses capacités créatives. J'étais stupéfait de la vélocité, de ses capacités créatives, de la rapidité de tout ça. Tout de suite, je lui ai dit « oui, il faut aller dans cette direction, ça me va bien ». Ce qu'il a fait avec beaucoup de talent. Au départ, ça m'a surpris parce qu’un cercle dans un cercle... Mais après une réflexion rapide, c'est ça qu'il fallait faire. Il a pu exprimer sa créativité dans un cadre ancien. Ce qu'il aime faire d'ailleurs.
Qu’est-ce qui vous touche dans le travail de Tadao Ando ?
Il m'avait montré que le béton est un matériau noble et qu'on peut en faire des choses d'exception. Le travail Tadao Ando, c'est l'aspect minimal de sa création. Tout ce qui est nécessaire est là, tout ce qui est superflu n'est plus là, c'est comme l'art minimal. Regardez les œuvres de Ando, il y a tout ce qu'il faut, rien de plus.
How does contemporary art make you feel?
It depends on the art. With some works, I feel very little or nothing at all. But from time to time, I come across a work that really stands out, a striking masterpiece that seems to call out to me, and that is a very good sign.
What happens in that first encounter with a work of art?
I’m incapable of defining what happens. I experience an intense emotion, something grabs me, calls out to me when I am truly struck by a piece of work. I’m often taken aback by this intensity and sometimes feel a little trapped because I tell myself that I cannot let this work get away. Then I embark on the process of adding it to a collection that will enable others to discover it, with the hope that they will experience the same emotion as I did when I first saw it.
What is the piece in your collection that has given you the most joy?
I hope that it will be the piece that I’ll discover tomorrow or in the years to come. Many of the works in my collection have brought me tremendous pleasure but I still hope that the most beautiful one, the one that will give me the greatest joy is still out there.
What wish do you have for the public who come to see your works?
There are lots of contemporary artworks, even some avant-garde ones, which a non-museum-going public might have some difficulty understanding. Nevertheless, I hope that they will at least try to understand, that they will open their mind in such a way that they can see things differently, in terms of their own life and world affairs. I really believe that art is the best medicine.
What makes the museum at the Bourse de Commerce so unique?
Firstly, there is its history and location in Paris and of course, the very impressive 18th and 19th-century architecture, with its extraordinary dome. This is why I wanted this building, from our past, to be restored with the utmost respect and attention to detail, in terms of what was built there a century or two previously, or even further back if we take the Medici Column. I also wanted great care to be taken in terms of Tadao Ando’s intervention. My intention was to show that this remarkable old building could exist in harmony with a radical 21st-century architectural design. The ensemble works perfectly. The same can be said for the art.
Why did you choose this old listed building in particular?
I think that by allowing today’s architects to appropriate this old building and to do something radically new with it is a way of showing that life goes on, that everything evolves. We shouldn’t reject the architecture or art of the past as there are some very beautiful things that were done in previous centuries, but at the same time, there are works of tremendous quality being created today, whether in architecture, painting or sculpture. Tadao Ando has proved this point rather brilliantly.
How did you react to Tadao Ando’s first design proposal for the Bourse de Commerce?
I was astounded because he proposed something so quickly. I was stunned by the speed of his creative abilities. I immediately accepted the direction he proposed, however. His work bears testimony to his considerable talent. At the beginning, I was surprised by this notion of a circle within a circle but after thinking about it, I rapidly realized that this was what needed to be done. He was able to express his creativity within the context of a historic building. This is what he loves doing.
What do you most appreciate about Tadao Ando’s work?
He convinced me that concrete is a noble material and that you can do incredible things with it. Tadao Ando’s work is about minimalism. Everything that is necessary is there, anything that is superfluous is no longer there, just like minimal art. Look at Ando’s creations, they have everything they need. But nothing more.